Juditha Triumphans – Revue de presse

Les étincelles en mouvement, ou « Juditha Triumphans ».

Antonio Vivaldi , Giacomo Casetti, mise en scène de Maria Sartova, Opéra de Chambre de Varsovie.

Vivaldi voulait créer un oratorio qui, par définition, est une forme musicale statique, et malgré lui, il en a fait une œuvre dynamique et tonifiante. La couche musicale de l’œuvre respire le mouvement, surtout sous la baguette d’Hugo Reyne, chef d’orchestre invité à l’Opéra de Chambre de Varsovie. Dans sa mise en scène, Maria Sartova a habilement exploité ce paradoxe en situant l’action de « Judith » dans les réalités de l’Holocauste. Personnellement, je n’apprécie pas l’intégration forcée de ce thème partout où cela paraît opportun. Par ailleurs, j’ai l’impression qu’il ne correspond pas tout à fait à la narration elle-même. Certes, dans le livret de Casetti, il y a la guerre, le tortionnaire et la victime, mais, dans ce contexte, que symbolise Judith décapitant Holopherne ? La mise en scène de Maria Sartova a cependant tant de vertus que les dissonances passent à l’arrière-plan. […]

Maria Sartova triomphe avec sa mise en scène. Le mérite en revient en grande partie aux merveilleux solistes et à l’ensemble vocal de l’Opéra de Chambre de Varsovie. Le metteur en scène mérite des éloges pour avoir « allumé » les étincelles de l’œuvre de Vivaldi, qui, enrichie par l’action scénique, brille d’un éclat extraordinaire sur la scène de l’Opéra de Chambre de Varsovie.

– Klaudia Kazmierczak, Dziennik Teatralny, le 12 octobre 2023.

 

DEUX ÉVÉNEMENTS pourraient électriser les mélomanes de Varsovie :

Un récital de la pianiste de renommée mondiale Marta Argerich, annoncé depuis longtemps, à la Philharmonie Nationale et à l’Institut de recherche de l’Union européenne.
L’oratorio très peu connu de Vivaldi : « Juditha Triumphans » à l’Opéra de Chambre de Varsovie.

Des artistes et des créateurs exceptionnels ; la mise en scène de Maria Sartova, la scénographie et l’éclairage scénique et les projections lumineuses de Damian et Elijah Styrn, les costumes d’Anna Chadaj, la direction musicale d’Hugo Reyne et les mouvements de scène créés par Emil Wesołowski  offrent à la ville de Varsovie un spectacle surprenant avec des idées de mise en scène qui  font que le public ne s’ennuie pas un seul instant. Faîtes-moi confiance, ce spectacle vaut absolument la peine d’être vu !!!

– Julian Korman, 5 octobre 2023.

 

Judith face à l’Holocauste

La réalisation de cette œuvre entreprise par Maria Sartova, autrefois chanteuse lyrique, aujourd’hui metteuse en scène recherchée et dont le travail est visible dans nos institutions musicales. Suivant à la lettre le livret, la mise en scène modifie l’espace des événements.

Il ne s’agit pas d’une Judée lointaine, mais d’un monde proche de nous, marqué par la catastrophe de la Seconde Guerre mondiale. C’est une colonnade et des miroirs vénitiens qui seuls constitue un espace scénique de petites dimensions. Cet universalisme construit par Damian Styrna comporte deux ajouts au proscenium. Il s’agit de fragments de forêt, d’arbres figés qui portent un mystère, comme des témoins silencieux des événements à venir. Dans les branches se cachent une bicyclette et une matzeva. De petites marques symboliques définissent avec justesse le champ des événements. En outre, l’ouverture est enrichie d’une scène de mariage juif, d’une violente attaque de troupes, ayant les caractéristiques d’un pogrom, qui détruit la paix et instaure la guerre. De plus, il humilie le peuple qui est dépouillé de ses vêtements au profit d’un treillis en rayures.

La construction de deux mondes qui s’opposent, celui des conquis et celui des conquérants, est une représentation claire de l’humiliation et de la décadence. L’action se déroule dans le camp d’Holopherne qui est un monde de sauvagerie, de dégénérescence, de pathologie, de licence et de perversion. Cette toile de fond, qui fait appel à un chœur et à des danseurs, sollicite fortement l’imagination du spectateur. La transposition de l’action à une époque qui n’est pas si éloignée de nous est également une réussite. Il ne s’agit pas d’une temporalité irréfléchie à une époque précise, mais d’une adaptation consciente et solidement préparée d’une œuvre d’opéra.

Les principaux protagonistes, un chef militaire et une jeune femme, représentent deux univers, deux mondes qui s’opposent. Sartova en fait une description très juste. Ainsi, elle prend le parti des opprimés, justifiant clairement l’acte de Judith comme un devoir envers Dieu au nom d’une juste cause.

– Benjamin Paschalski, Cultural Cham. e-teatr.co.uk, 27 octobre 2023.